- Partie 2 -
Les annulatifs et ce qui exige l’expiation
Ce qui n’implique pas de rattrapage
Ce qu’il est recommandé, déconseillé ou permis de faire
Le statut lié à certaines questions contemporaines
Les annulatifs dont il est obligatoire de s’abstenir durant le jeûne :
Nous les évoquerons ici de manière générale, puis nous les détaillerons chacun leur tour.
Le rapport charnel.
L’émission de sperme (many) ou de liquide pré-spermatique (madhy) volontairement.
Se faire vomir volontairement.
Le fait que parvienne un liquide à la gorge, volontairement ou involontairement, peu importe que cela soit parvenu à l’estomac ou non, peu importe que cela soit entré par l’entremise de la bouche, du nez, de l’oreille, de l’œil, ou des pores de la tête. On intègre dans cela les traitements et les gouttes dans les yeux et les oreilles, le kuhl (ou khôl) quel’on met sur les yeux, et toutes les choses dont le jeûneur sait que s’il l’utilise après l’aube cela parviendra à sa gorge avant le coucher du soleil. Mais s’il sait qu’habituellement cela ne parviendra pas à sa gorge, il n’y a pas de mal à l’utiliser durant la journée de Ramadan, mais si cela y parvient alors il lui incombera de rattraper ce jour.
Le fait que parvienne une chose liquide à l’estomac, peu importe que cela advienne par la bouche ou par voie anale, nous détaillerons plus loin cela.
Le fait que parvienne une chose non liquide à l’estomac par l’entremise de la bouche uniquement. Quant à si une chose solide parvient à la gorge uniquement, cela n’annule pas, comme la caméra médicale ou le cathéter s’il est introduit sans que cela ne parvienne à l’estomac.
Inhaler l’encens qui parvient à la gorge, ainsi que la fumée ou certains traitements que l’on inhale.
Le fait que parvienne la vapeur de cuisson jusqu’à la gorge en inhalant. Mais si cela parvient involontairement, alors il n’y a pas à rattraper en cela.
Ravaler le vomi involontairement (ghalabatan) ou le reflux gastrique dès lors qu’il fut possible de le recracher de la gorge vers la bouche. S’il n’était pas possible de le recracher, alors il n’y a rien en cela. Quant aux glaires et à la salive, les avaler n’invalide pas le jeûne. Ce sont des éléments qui de manière générale annulent le jeûne. Toutefois, certains impliquent le rattrapage uniquement, tandis que d’autres impliquent le rattrapage et l’expiation à la fois. C’est ce détail que nous allons voir dès à présent.
Ce qu’implique de réaliser un des annulatifs cités précédemment :
Rompre le jeûne durant Ramadan implique soit le rattrapage avec expiation, soit le rattrapage uniquement.
L’expiation est exigée en plus du rattrapage à cinq conditions :
Le caractère délibéré (al- ’amd) : ça n’incombe pas à celui qui a rompu par oubli.
Le caractère volontaire (al-ikhtiyâr) : ça n’incombe pas à celui qui a rompu en y étant contraint ou par inadvertance (ghalabatan).
Le fait de violer la sacralité du mois de Ramadan : ainsi il n’y a pas d’expiation pour celui qui s’est trompé de façon crédible comme on le verra.
Le fait d’avoir connaissance de cette interdiction : celui qui ignore cette interdiction n’aura pas à expier.
Que cela advienne durant le mois de Ramadan : il n’y a pas d’expiation exigée pour celui qui rompt volontairement son jeûne en dehors de Ramadan, ou même lors d’un jour de rattrapage de Ramadan.
Il incombe donc le rattrapage uniquement dans les situations ne remplissant pas les conditions précitées, tout comme cela implique de rompre la succession du jeûne, par conséquent il lui faudra renouveler son intention pour le reste du mois.
Il existe trois types d’expiations :
Nourrir 60 pauvres, en donnant à chaque pauvre un mudd (unité de mesure), correspond au mudd du Prophète (ﷺ), ce qui équivaut à environ 525gr, pour un total de 31,5kg.
Jeûner deux mois consécutifs.
Libérer un esclave croyant exempt de défauts.
Celui à qui il incombe de réaliser l’expiation a le choix entre ces trois procédés, bien que le fait de donner à manger soit meilleur.
Les annulatifs qui implique le rattrapage et l’expiation
Revenir sur son intention de jeûner durant la journée, ou de nuit en persistant en cela jusqu’au lever de l’aube. Car l’intention d’annuler le jeûne durant celui-ci est prise en considération, contrairement au fait de revenir sur cela une fois le jeûne terminé.
Le rapport charnel volontaire (par l’intromission du gland même sans éjaculation), que ce rapport soit licite ou illicite.
L’éjaculation de sperme volontaire, à la suite d’un contact ou autre, même par une pensée continue ou un regard, car tout cela est assimilé au rapport charnel. Mais s’il a éjaculé sans qu’il n’ait persisté dans ses pensées, alors il n’y a pas d’expiation.
Le fait de volontairement faire parvenir un liquide à l’estomac, par la bouche uniquement. Mais si ça parvient à la gorge seulement, sans aller jusqu’à l’estomac, ou que cela parvient à l’estomac mais en passant par le nez ou l’oreille, alors il n’y aura qu’à rattraper (sans expiation).
Se faire vomir volontairement et en ravaler quelque chose, ou vomir involontairement mais en ravaler volontairement, mais si on ravale par oubli il n’y a pas d’expiation.
Est-ce que l’expiation est exigée pour l’ensemble des annulatifs ?
En plus de considérer la volonté de violer la sacralité du mois ou non, les savants distinguent également entre l’annulation délibérée du jeûne et le cas d’une excuse pouvant se justifier. C’est ce qu’ils appellent une « interprétation plausible » (al-ta’wîl al qarîb). C’est le fait de s’appuyer sur une chose qui existe en tant qu’excuse légale dans la législation islamique. Quant à l’« interprétation lointaine » (al-ta-wîl al-ba’îd), c’est lorsque l’on s’appuie sur une chose illusoire. Si la rupture du jeûne a pour cause une interprétation lointaine, alors on exigera l’expiation en plus du rattrapage. Mais s’il s’agit
d’une interprétation plausible, alors on exigera le rattrapage seulement, sans expiation.
Exemples d’interprétation lointaine :
Une femme qui a pour habitude d’avoir ses règles tous les 10 du mois, et qui en pleine journée est résolue à rompre et n’a pas l’intention de jeûner pour cela. Il lui incombera à la fois de rattraper et d’expier, quand bien même les saignements surviendraient dans les faits en ce jour, car ce qui lui incombe était de jeûner et de s’abstenir jusqu’à ce qu’adviennent ses règles, puis elle aurait rompu son jeûne.
Un malade qui anticipe la venue de sa maladie ou d’une fièvre qui lui vient chaque mois, et qui décide de rompre (en anticipant la venue de la maladie), il lui incombe l’expiation quand bien même ce qu’il anticipait est advenu.
Exemples d’interprétations plausibles :
Celui qui mange ou boit par oubli, et il croit qu’il ne lui incombe pas de s’abstenir le restant de la journée compte tenu du fait que son jeûne est invalide, alors il décide de rompre (en continuant de manger ou de boire), il lui incombe de rattraper seulement.
Celui qui est revenu de son voyage avant l’aube, et il pensait avoir le droit de rompre et a rompu, il lui incombe de rattraper seulement.
Celui qui se trouve en état de grande impureté (janâba) durant la nuit [et il se réveille dans cet état après l’aube] et il pense qu’il a le droit de rompre, alors il rompt, il lui incombera le rattrapage seulement.
Ainsi, celui qui rompt à cause d’une interprétation jugée plausible n’aura pas d’expiation à réaliser, sauf s’il a la connaissance de l’interdiction de ce qu’il fait ou même s’il en doute, car dans ce cas il lui incombera l’expiation.
Les choses pour lesquelles il n’y a pas de rattrapage :
Concernant les annulatifs précédemment évoqués, nous avons distingué dès lors que cela est fait volontairement si cela impliquait l’expiation en plus du rattrapage, ou bien le rattrapage seulement.
Les exemples suivants concernent des choses tolérées, qui n’exigent même pas de rattrapage :
Vomir (involontairement) sans que rien ne redescende à l’estomac, de même le reflux gastrique (qalas) involontairement. De même s’il n’est pas possible de le recracher à l’extérieur de la bouche (car le vomi ou le reflux ne sont pas remontés suffisamment haut pour que cela soit possible). Le reflux gastrique (qalas) correspond au liquide qui sort depuis l’estomac lorsqu’il est plein.
Avaler involontairement les mouches ou la poussière de chemin.
Avaler ce qu’il reste de nourriture entre les dents vis-à-vis de ce que l’on a mangé avant l’aube.
Avaler involontairement la poussière de gypse, de ciment, ou du tamisage, et l’ensemble des choses équivalentes, pour celui dont le métier l’y expose.
L’injection par le sexe, pour l’homme comme pour la femme (urètre ou vagin), et ce même pour une chose liquide, car ça ne parvient pas à l’estomac.
L’injection via les tissus musculaires, sous la peau ou par voie intraveineuse, parmi ce qui n’est ni nourrissant, ni antibiotique, ni constitué de vitamines ou de minéraux, etc.
Les traitements et pommades que l’on applique sur la blessure, quand bien même elle se situerait au niveau du ventre, ou au niveau de l’orifice anal, car ça ne parvient pas à l’endroit de la nourriture, comme les suppositoires, etc.
La sortie du liquide spermatique ou du liquide pré-éjaculatoire sans aucun plaisir ou par un plaisir non-ordinaire.
La ventousothérapie (hijâma) ainsi que la prise de sang ou les analyses sanguines.
Les choses qu’il est détestable d’accomplir pour le jeûneur :
Il est déconseillé au jeûneur certaines choses qui n’annulent pas le jeûne, par exemple :
Gouter un plat, son assaisonnement, du miel, ou autre, de sorte qu’il teste puis le recrache et que rien ne parvienne à sa gorge.
Les prémices du rapport charnel, comme le baiser, la pensée et le regard voluptueux, tant que la personne se sait exempte (d’émission de sperme ou de liquide pré éjaculatoire). Car ces choses sont propices à l’émission de liquide pré-éjaculatoire, et. sont propices à mener à davantage encore. Et on a déjà vu ce que cela peut impliquer en matière de rattrapage ou d’expiation précédemment.
Se parfumer durant la journée, et sentir le parfum.
La ventousothérapie (hijâma) pour le malade s’il doute si, avec la fatigue que cela va générer, ça le conduira à rompre le jeûne à cause de cela. S’il sait que cela n’adviendra pas, alors cela lui est permis, peu importe qu’il soit malade ou bien portant. Et s’il sait que cela adviendra, alors ça lui est interdit d’y recourir.
Le jeûne continue en enchaînant les journées de jeûne l’une après l’autre sans rupture (au moment du coucher du soleil), ni repas précédant l’aube (sahûr).
Les choses recommandées pour le jeûneur :
Abstenir sa langue et ses membres des propos et actes futiles pour lesquels il n’y a pas de péché. Cela est demandé à toute personne en tout temps, mais plus encore pour le jeûneur.
Précipiter la rupture une fois le coucher de soleil certifié, et avant de prier.
Que la rupture se fasse à l’aide de dattes fraiches d’un nombre impair, sinon par des dattes sèches. Et à défaut d’en trouver, par des gorgées d’eau. Et qu’il s’apprête rapidement à la prière du coucher du soleil (maghrib).
Le repas précédant l’aube (sahûr), qui se réalise durant la seconde moitié de la nuit, et le fait de le retarder jusqu’à l’approche de l’aube est meilleur.
Les choses permises au jeûneur :
Recourir au siwâk (brosse à dent) durant l’intégralité de la journée.
Se rincer la bouche en cas de soif ou de chaleur, ou se rafraichir en se lavant.
Se réveiller en état d’impureté majeur (janâba), bien que procéder à la grande ablution (ghusl) avant l’aube est meilleur.
Les conditions permettant la rupture du jeûne en cas de voyage :
Que son voyage soit celui permettant le raccourcissement des prières (qasr), c'est-à dire d’une distance équivalente à 77 km environ.
Que le voyage soit licite, et non un voyage illicite.
Que le voyageur ait l’intention de rompre durant la nuit.
Qu’il entame son voyage avant l’aube, en sortant de la ville avant le lever de l’aube.
Ce n’est qu’à ces conditions qu’il est permis au voyageur de rompre, il lui est dès lors permis de rompre même lorsqu’il fera escale deux jours ou trois dans son lieu de voyage, tant qu’il n’a pas pour intention de séjourner quatre jours complets au sein desquels entre le temps de vingt prières, car dans ce cas, il lui incombera de jeûner.
Quand est-il permis au malade de rompre ?
Il est permis de rompre pour tout malade, jeune ou âgé dès lors qu’il craint que le jeûne ne génère une maladie, son aggravation, le retardement de sa guérison, ou bien qu’il ressente une forte pénibilité, et dans tous les cas il lui incombera de rattraper.
Il devient obligatoire de rompre au malade s’il craint que le jeûne ne le conduise à sa perte, ou à un fort préjudice comme la perte d’une fonction ou d’un sens.
La rupture pour la femme enceinte et celle qui allaite :
La femme enceinte et la femme qui allaite sont dans un des deux cas suivants :
10. Soit elles craignent pour elles-mêmes, leur statut est ainsi celui du malade selon le détail vu précédemment.
11. Soit la femme enceinte craint pour le fœtus et celle qui allaite pour l’enfant, il leur est donc permis de rompre.
La femme enceinte, si elle rompt le jeûne, il lui incombe de rattraper uniquement, elle n’a pas à nourrir. Quant à la femme qui allaite [qu’elle craigne pour elle-même ou pour l’enfant] il lui incombera de rattraper ainsi que de nourrir [ce qu’on appelle la fidya] en donnant la quantité d’un mudd pour chaque jour, un volume que nous avons déjà précisé précédemment.
La femme qui allaite, dès lors qu’elle peut louer les services d’une nourrice (pour la remplacer dans l’allaitement), ou que l’enfant accepte de se nourrir par un autre lait que le sien, il lui incombera de jeûner. Quant au salaire à dépenser pour le service d’allaitement, cela se fait à partir des biens de l’enfant ou du père.
Si le jeûneur procède à un annulatif sur plusieurs jours, ou à plusieurs annulatifs en un même jour :
On multiplie les expiations autant que l’on compte de jours durant lesquels il y a eu annulation du jeûne. Ainsi celui qui rompt délibérément le jeûne durant l’intégralité du mois de Ramadân, il lui incombera de rattraper le mois complet, ainsi que 30 expiations.
Celui qui a un rapport charnel ou boit de l’eau pendant deux jours, il lui incombe de rattraper ces deux jours ainsi que deux expiations.
Quant à celui qui mange, boit et a un rapport charnel dans un même jour, il lui incombe de rattraper un jour et une seule expiation. S’il advenait une seconde cause impliquant une seconde expiation après s’être acquitté de la première expiation, il ne lui incombe toujours qu’une seule expiation.
Le statut de l’usage du dentifrice durant le jeûne :
Le critère à retenir sur cette question est le fait que quelque chose parvienne à la gorge depuis la bouche. Si le dentifrice est fort, et qu’une partie accès à la gorge, c’est un annulatif du jeûne. Si le dentifrice est léger, et que le jeûneur parvient à s’en prémunir, alors sa situation est similaire à celui qui goûte la nourriture comme on l’a déjà vu.
L’usage des aérosols (Ventoline) :
Les aérosols et autres traitements respiratoires ont pour principe d’être injecté dans la trachée respiratoire en direction des poumons. Si celui qui y recourt ne ressent aucun goût dans sa gorge, cela n’annule pas le jeûne. Et ce, tant que l’aérosol ne fonctionne pas à l’eau, car dans ce cas ceci annule.
L’usage des injections de solutions nutritives :
Elles annulent. Même si ce n’est pas par voie orale et ne parvient pas à l’estomac. Le critère est que cela procure au corps l’effet de l’alimentation, cela part dans le sang et dans les cellules directement sans digestion. C’est permis en situation de nécessité, et ça exige le rattrapage.
Le statut de celui qui voit Ramadan arriver et à qui il reste des jours non-rattrapés du Ramadan précédent :
Celui qui se montre laxiste quant au rattrapage des jours de Ramadan, et qui n’a pas d’excuse qui l’empêchait de les rattraper comme la maladie ou autre, et que le second Ramadan vient à arriver, il lui incombe de nourrir par un mudd pour chaque jour dont il n’a pas réalisé le rattrapage à temps. Il s’en acquitte qu’une seule fois, cela ne se multiplie pas même s’il s’écoule d’autres Ramadan. Mais le rattrapage des jours reste une dette le concernant.
Et s’il avait une excuse à la fin du mois de Cha’bân qui l’empêchait une durée correspond aux jours qu’il devait rattraper, alors il n’aura pas à nourrir.
Le statut de celui qui se voit en incapacité de jeûner à cause de son âge avancé ou d’une maladie :
Le décrépit qui est d’un âge avancé et dont le corps n’a plus la vigueur suffisante pour jeûner, il a le droit de rompre, et il lui sera recommandé de nourrir d’un mudd pour chaque jour.
Il en est de même du malade à qui deux médecins musulmans connaisseurs prescrivent de ne pas jeûner, son statut est le même.
Mais si les deux médecins lui interdisent de jeûner en période de canicule, ou durant les jours longs, et qu’il peut rattraper en hiver, il lui incombera alors le rattrapage.
Allah est plus Savant et plus Sage
Sources :